Des Tropiques à l’Arctique : une éternelle histoire!


« Pourquoi diable es-tu venu ici ??? » entends-je souvent depuis 11 ans. Oui. Pourquoi ai-je donc quitté la Martinique, une île tropicale Française où la température minimale possible le matin en « hiver » est de 20°C… pour venir à Rimouski (Québec, Canada) où il neige 5 mois par année et où la température hivernale moyenne est de -15°C ? Et bien sapristi, c’est sans doute une des meilleures idées que j’ai eues.

L'estuaire gelé du fleuve St Laurent. (Crédit : Quentin Duboc)

L’estuaire gelé du fleuve St Laurent. (Crédit : Quentin Duboc)

Avant de venir à Rimouski pour faire un Cégep (sorte d’école post-secondaire qui n’existe qu’au Québec) en Sciences de la Nature, je n’avais jamais vu de neige de ma vie. Évidemment, puisqu’il fait entre 26°C et 35°C 365,25 jours par année en Martinique !! Avec 90% d’humidité, bien sûr. N’essayez donc pas de faire votre jogging à 14h là-bas. J’étais donc bien content d’enfin découvrir cette fameuse poudre blanche capable de paralyser Paris avec juste 3 cm. Sauf que pour mon 1er hiver à Rimouski, on a eu droit à 4m de neige en tout! C’est incroyable comment cela peut vous changer un paysage. Et que dire de l’estuaire du Saint-Laurent juste devant la ville? Une longue île située à 2km du rivage protège la côte des vagues et permet à l’eau de geler suffisamment pour marcher dessus, pêcher à travers la glace ou encore faire du snowkite sur la neige qui la recouvre.

C’est aussi un bon choix de venir habiter au Québec, et encore plus à Rimouski, si vous aimez les changements de saison. Car ici la météo est très capricieuse: en hiver la température peut descendre à -35°C et, l’été, elles sont au-dessus de 20°C mais peuvent atteindre 35°C pendant les canicules. Et cela est accentué à -45°C et +45°C respectivement par le vent en hiver et l’humidité en été! Une amplitude de 90°C à travers l’année… C’est pourquoi vous avez besoin d’une grande garde-robe ici. Et il est aussi possible d’avoir une chute de 25°C en un seul jour en hiver !! C’est dingue, et j’adore ce pays.

Dix ans plus tard, je ne suis pas tanné de ça, et je fais maintenant mon doctorat à l’Université de Québec à Rimouski (UQAR) depuis janvier 2017 sous la supervision de Guillaume St-Onge, après avoir fini ma maitrise avec lui. Je travaille sur les processus sédimentaires affectant la marge continentale du Québec et du Labrador durant la déglaciation à l’Holocène.

Ce qui est cocasse c’est que Guillaume m’a donné le choix entre deux sujets : celui-ci dans l’Arctique et le subarctique, et un autre… dans les Caraïbes! Exactement là où j’ai passé ma jeunesse, pure coïncidence. Cet autre projet concernait l’impact des turbidites d’origine sismique sur l’enregistrement paléomagnétique dans les carottes sédimentaires. Je n’ai pas beaucoup hésité, parce que je voulais vraiment travailler dans la région arctique, et c’était aussi l’occasion d’intégrer ArcTrain et de rencontrer d’autres personnes travaillant dans cet environnement reculé.

Le navire français RV Pourquoi Pas? (Credit: Gérard Duboc)

Malgré mon choix, j’ai eu la chance d’aller sur des navires de recherche dans les deux régions. Durant l’été 2016, nous étions plusieurs de Rimouski à participer à une de 6 semaines mission pour échantillonner les carottes du projet dans les Caraïbes, sur le navire de recherche français le Pourquoi Pas ? Vu que mon père est pilote d’avion pour les douanes là-bas, il a eu l’opportunité de faire un petit détour pour voler au-dessus et à côté du bateau. Le commandant était un poil stressé par le fait qu’un avion passe à moins de 50 m du bateau, mais c’était une occasion de prendre de nouvelles photos du bateau vu du ciel, et gratuitement (l’une d’entre elles s’est même rendue jusqu’au calendrier d’ArcTrain).

De plus, l’an dernier, j’ai eu la chance de participer à la mission MSM66 dans la baie de Baffin, où j’ai rencontré d’autres étudiant·e·s ArcTrain à bord du R/V Maria S. Merian. Des icebergs tous les jours, le soleil de minuit, la glace de mer et de magnifiques paysages de fjords… Contrairement aux Caraïbes, il n’y a pas tant de monde que ça qui ont l’occasion de visiter ces régions reculées, ou alors il faut payer une fortune pour y aller en croisière à bord d’un horrible building flottant. Finalement, et parce que je n’en ai pas encore parlé (quoi? C’est possible?), mon choix d’étudier l’Arctique plutôt que les régions tropicales est aussi motivé par un intérêt pour le changement climatique et la possibilité d’y observer les impacts au cours d’une vie humaine, même s’il est rarement possible d’y prendre un bain de soleil sur le pont pendant les pauses!

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